Suite à l’interpellation de collectifs et habitant·es des Pyrénées-Orientales, j’ai interrogée le Ministre délégué aux transports sur les travaux de construction d’un nouveau quai à Port-Vendres.
Vous pouvez retrouver la question ici.
Mme Nathalie Oziol appelle l’attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur la construction du nouveau quai dans le port de commerce de Port-Vendres.
Le Conseil départemental des Pyrénées-Orientales, en charge du port, et désormais propriétaire par un transfert récent de l’État, met en oeuvre la construction d’un nouveau quai dans le port de commerce de Port-Vendres, projet imaginé depuis une trentaine d’années et maintes fois repoussé. Pourtant, les travaux ont commencé en septembre 2023. La construction du quai suppose le comblement d’une anse marine naturelle, l’anse des Tamarins, la destruction d’espèces animales et végétales protégées et la probable destruction de vestiges archéologiques, ce point étant nié par le maître d’ouvrage. Le port de Port-Vendres est réputé par la découverte de plusieurs épaves antiques et la collecte de nombreux objets, amphores, vaisselle, bijoux, etc. Les associations locales de protection de l’environnement, des biens culturels et de l’intérêt général de la population contestent ce projet sur de nombreux points, sans jamais obtenir des réponses claires et directes à leurs questions.
Outre les destructions citées, l’utilité du projet est douteuse. Les quais existants pour le commerce sont utilisés à moins de 30% de leurs capacités. Aucune étude sérieuse ne montre un accroissement des besoins qui justifierait cette extension, alors que la modernisation des quais existants rendrait un service suffisant. De plus, les caractéristiques physiques du port limitent la taille des bateaux pouvant y accéder et la construction du quai pourrait accroître les risques pour les biens et les personnes en cas de forte submersion. En mars 2022, le préfet des Pyrénées-Orientales a prorogé les autorisations accordées en août 2017, au motif qu’il n’y a eu « aucune modification de fait ou de droit ». Pourtant, le droit touchant aux obligations archéologiques et aux études d’impact a changé. La perception des effets du changement climatique est toute autre.
De plus, depuis 2019, sur la base de nombreux témoignages, une procédure judiciaire a été engagée par le procureur de Perpignan pour destruction de biens culturels archéologiques. Le 5 octobre 2023, le Conseil départemental a confié la délégation de service public de gestion du port à une société privée, la Compagnie Port-vendraise, portée à 75% par la société Transit Fruits (filiale à 100% de la Compagnie Fruitière), à 20% par la CCI de Perpignan, à 5% par une filiale d’EDF. Des points sont à clarifier. Des fouilles appropriées n’ont pas été entreprises pour statuer sur les hypothèses de l’archéologue de l’INRAP, Marc Guyon, en 2001 et 2003, de présence de structures portuaires antiques dans l’anse des Tamarins. Il y a là une controverse qui ne peut être tranchée que par de véritables fouilles.
Le financement du projet : le flou est entretenu sur le coût du projet. Entre construction du quai et autres aménagements, les annonces et estimations vont de 30, à 50, voire 80 millions d’euros. L’UE ne contribue pas, ni la région Occitanie malgré ce qui figurait dans le projet autorisé. À part une participation limitée de l’État et du délégataire de service public, la plus grosse part de financement est à la charge du département par prélèvements successifs sur ses budgets annuels, ce qui n’est pas normal pour un projet d’investissement de cette ampleur. Les équilibres financiers du port : la situation financière du port et sa rentabilité ne sont pas rendues publiques. Pour certaines années, on trouve mention de subventions d’équilibre du département à la CCI, précédent gestionnaire depuis 60 ans. Quelle est donc la situation financière réelle du port de commerce ?
La délégation de gestion : la Compagnie Fruitière, multinationale produisant des fruits en Afrique et les commercialisant en Europe, est le principal utilisateur du port de commerce, avec un cargo par semaine. Depuis des années, l’activité de pêche décline, la plaisance stagne et la réparation navale a quasiment disparu. L’utilisateur du port de commerce ne semble pas le choix le plus judicieux pour gérer et relancer ces autres activités, en tant que délégataire de service public. Ses engagements en la matière n’ont pas été rendus publics.
En conséquence, Mme la députée relaie la demande des associations d’un arrêt immédiat des travaux afin de revoir l’intérêt de ce projet écocide et dont les retombées économiques ne sont pas évidentes. La suspension des travaux doit permettre de faire les fouilles archéologiques indispensables, sous contrôle d’experts incontestables, de rendre publics et permettre l’étude des comptes du port depuis les débuts de son utilisation par la Compagnie Fruitière, mais aussi de rendre public et permettre l’étude du contrat passé par le Conseil départemental avec la Compagnie Port-vendraise, en particulier les conditions financières pour l’utilisation des infrastructures par la Compagnie Fruitière et les engagements stratégiques du délégataire pour l’ensemble des activités portuaires.