Question écrite au Ministre de la santé et de la prévention le 7 novembre 2023
Mme Nathalie Oziol appelle l’attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la récente déclaration du directeur de l’Agence régionale de santé Occitanie concernant la potabilité de l’eau, notamment du fait de sa concentration élevée en composés PFAS, polluants éternels, dangereux pour la santé humaine. Depuis de nombreuses années, les associations alertent sur la concentration en PFAS des eaux de surface françaises. En 2022, le consortium de journalistes et de scientifiques Forever Pollution Project publiait une enquête qui répertoriait les lieux de contamination principaux à travers l’Europe. Plus de 17 000 sites dépassent le seuil réglementaire de 10 ng/L et 2 100 présentent un danger aigu, dépassant le seuil sanitaire de 100 ng/L. Dans l’Aveyron, à Sainte-Eulalie-de-Cernon, une concentration à 810 ng/L a même été mesurée au niveau de la source d’eau. C’est 8 fois plus que le seuil sanitaire. Conséquence : en 2020, le programme national de biosurveillance Esteban en a détecté des traces dans le sang de 100 % des Françaises et des Français, enfants inclus. Car quoique sous-étudiés, ces polluants éternels sont très toxiques. Perturbateurs endocriniens, ces composés perfluoroalkylés et polyfluoroalkylés sont corrélés par plusieurs études avec les cancers de la thyroïde, des testicules, du sein ou des reins. Ils ont un impact sur la natalité et causent de nombreuses maladies cardio-vasculaires. Leur dangerosité est reconnue depuis 2001 grâce à la convention de Stockholm qui visait à réduire l’usage des PFAS les plus toxiques, comme l’acide perfluorooctanesulfonique. Ces composés utilisés dans l’industrie chimique et agroalimentaire, notamment pour un usage imperméabilisant sont aussi massivement présents dans la mousse anti-incendie (AFFF) utilisée dans les lieux publics. En janvier dernier, un plan d’action ministériel de lutte contre les PFAS a été présenté : la dangerosité est actée, puisque l’État affiche le souci de les interdire. Mais aucune mesure d’urgence sur cette contamination n’est annoncée. La responsabilité déléguée aux ARS de « compléter le contrôle sanitaire qu’elles mettent en œuvre » a pourtant porté ses fruits. Le directeur de l’ARS Occitanie, en étendant le périmètre des mesures, a confirmé par courrier interne ce que les associations dénoncent depuis des années : « il y a des PFAS et des métabolites partout. Plus on va en chercher, plus on va en trouver ». « Ne plus faire » de contrôles ne peut être la solution idéale. Et surtout « ne plus consommer l’eau du robinet ». Dès lors, deux conclusions sont impératives. Premièrement, engager le principe de précaution en mobilisant la puissance publique pour une réduction drastique des risques, notamment sur l’eau de consommation qualifiée à tort de potable. Deuxièmement, rendre effectives et transparentes les données au niveau national à l’échelle la plus fine possible. Dans son rapport d’avril 2023, l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable recommande d’œuvrer pour engager une interdiction d’usage et de production des PFAS, pour plus de transparence, pour des bases de données centralisées ainsi que pour un inventaire national des concentrations de PFAS dans l’environnement. Surtout, elle plaide pour une feuille de route formalisée sur les PFAS avec un pilotage national. Considérant ces recommandations, considérant la communication alarmante de l’ARS Occitanie, considérant le report de la révision du règlement européen « REACH » pour 2025 au plus tôt, quelles mesures d’urgence envisage M. le ministre de la santé et de la prévention afin de réduire les concentrations de PFAS dans les eaux françaises ainsi que dans les matériaux au contact des denrées alimentaires ? Le ministre de la santé prévoit il l’instauration d’une limite maximale résiduelle sur les PFAS en France ? Le Gouvernement prévoit il la mise en place d’analyses nationales dont les résultats seraient publics ? Quelle alternative à l’eau du robinet l’État s’engage-t-il à mettre en place pour garantir un approvisionnement non toxique aux populations d’Occitanie ? Le blocage des prix de l’eau en bouteille, permis par le Code du commerce, figure-t-il au rang des solutions envisagées ? La santé des concitoyens est en jeu et l’opacité inquiétante dont les pouvoirs publics font preuve concernant la contamination aux PFAS ne peuvent qu’inquiéter.